Pa(e)nser Haïti

Princeton, le lundi 29 avril 2019     Les pauvres seront encore plus pauvres, et ils seront encore plus nombreux (…). Faibles et inorganisés, les pauvres sont pris en otage. Tel est le point de vue d’un grand intellectuel et économiste haïtien, Marc L. Bazin.  D’un coté, ils sont coincés  par les forces obscures de l’argent et, de l’autre coté, par une classe moyenne opportuniste et, à l’occasion populiste, qui exploite la rancoeur et les frustrations des pauvres, souvent à des fins personnelles. Fin de citation ! Le constat de Marc Bazin est d’une lucidité décapante, tant il interpelle le bon sens et ceux dont les coeurs sont meurtris devant le spectacle triste et ridicule du jeu politique haïtien.  Mais, ce dont il s’agit maintenant, et c’est extrêmement inquiétant, c’est que la pauvreté semble atteindre désormais nos cœurs, nos esprits, nos âmes.  NOUS TOUS ! Nous semblons avoir perdu le sens de la dignité, d’un certain courage , de toute capacité de constater le mal et,

Les politiques d’exclusion et de marginalisation des masses, la relégation de ces dernières dans les espaces sociaux vides, leurs transformations en soutes de l’histoire, la création des conditions d’émergence de la bourgeoisie parasite sont autant d’indices de graves blessures intérieures et extérieures qui rongent les organes d’Haïti, qui méritent d’être pansées pour être (Haïti) pensée par la suite. Aujourd’hui, plus que jamais, les plaies se puent, le pays danse sous des mines, sa mort n’est plus loin. La mort du peuple aussi ; alors, il faut pa(e)nser ! De plus, pa(e)nser en Haïti reste un sport de combat, et c’en est encore plus pour l’exercice de « pa(e)nser Haïti ». Mais, comme citoyen(ne) et intellectuel(le), c’est un devoir. Comment pa(e)nser Haïti aujourd’hui ? Des propositions, des éléments de réponses bientôt avec nos contributeurs/trices. Pa(e)nsons Haïti !

Mesdames, Messieurs, J'éprouve un grand plaisir à vous recevoir ce soir pour vous parler un peu de ce que je me propose de faire dans le cadre de mes recherches au Collège International de Philosophie. madinin-art.net Depuis quelques temps, je suis particulièrement intéressé par la pensée de la créolisation, élaborée par Édouard Glissant. D'abord, c'est une pensée qui a pris forme à partir des expériences caribéennes, prenant en compte ce qu'il y a de plus essentiel dans ces expériences, l'esclavage. Tout en prenant en compte l'esclavage, Glissant permet de suivre les formes de devenir des héritiers des esclaves, et changer le destin traumatique de ceux-là en pouvoir de créativité. Ensuite, l'un des aspects de l'expérience caribéenne porte sur le déracinement, qui consistait pour les Européens à arracher de leur terre, de leur encrage culturel ou symbolique des Africains. Cet aspect devient aujourd'hui, de manière plus intensive, en ce s